Autour de la famille diocésaine, ces cinq jeunes issus des paroisses de Ngohé, de Fandène, de Sainte Anne et du Léhar viennent de franchir une étape décisive dans leur cheminement vers le sacerdoce ; si Dieu, par nos prières, veut bien achever en eux ce qu’il a commencé, ils grossiront bientôt les rangs du clergé diocésain. En attendant, Monseigneur Gueye leur a délivré cette exhortation :
« Il n’y a guère longtemps, j’ai concélébré à une ordination diaconale en Allemagne et l’évêque présidant avait d’abord revêtu la dalmatique, l’habit spécifique du diacre, avant d’endosser sa propre chasuble. Vous savez pourquoi ? Pour signifier principalement deux vérités : le diaconat est la base du sacerdoce. On dit qu’il en est le 1er degré, non pas à dépasser, mais à une étape à capitaliser, à conserver comme fondement, comme tremplin, et même, comme gage et condition sine qua non, car c’est dans la diaconie, le service, que réside le sacerdoce, son essence. Et c’est pourquoi, 2ème vérité, l’épiscopat, 3ème degré de sacerdoce, est le sommet du service, le sommet de la diaconie, selon la logique même établie par Jésus lui-même en Marc 10, 45 : la grandeur véritable dans l’humble condition de serviteur : « Celui qui voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur et celui qui voudra être le premier, sera l’esclave de tous ».
Donc chers amis et fils ordinands, les paroles que je vous adresse aujourd’hui, je me les adresse à moi d’abord et à tous les prêtres ici rassemblés.
Les textes qui sont ceux de ce 7ème jour dans l’octave de Pâques, nous rejoignent pour nous aider à approfondir le sens du diaconat et même de notre vie chrétienne tout court. Il s’agit pour nous tous, fidèles du Christ, d’être témoins du Ressuscité, partout où il nous envoie : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Evangile à toute la création ».
Le Christ, se manifestant aux Onze, pendant qu’ils étaient à table, leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs. C’est d’ailleurs ce qui justifie qu’il se manifeste personnellement, directement, avant de leur confier la mission, créant ainsi avec eux une relation immédiate et fondatrice. En méditant ces lignes, j’ai découvert pour moi et pour vous la nécessité de cultiver un lien privilégié, intime, avec le Christ, pour nourrir notre foi, afin de pouvoir rendre témoignage de sa présence active, tout comme l’ont fait Pierre et Jean, en guérissant l’infirme de naissance, au nom du Ressuscité.
Le manque de foi nous guette, nous ministres du Christ, si nous faisons les choses dans la routine ou pour nous acquitter d’un devoir formel, ou si nous considérons le sacerdoce comme une simple fonction, comme un pouvoir sur le peuple, comme un objectif enfin atteint, avec un grand soulagement. C’est ce qui entraîne la dureté de cœur qui nous transforme en hommes renfermés sur nous-mêmes, sur notre moi, nos préoccupations, nos ambitions, incapables de voir, de sentir, de compatir, recherchant l’autosatisfaction, développant l’autoréférentialité. C’est tout le contraire du sacerdoce qui est un don sacré, reçu gratuitement, pour qu’il soit donné gratuitement. Une certaine étymologie acceptée du terme, nous invite à une telle compréhension du reste : sacra dare, donner les choses sacrées. C’est bien ce que fit Pierre pour l’aveugle : « de l’argent et de l’or, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus le Nazaréen, lève-toi et marche ». C’est d’abord cela que le peuple attend des pasteurs.
En relisant la 1ère lecture, nous pouvons y trouver des dispositions requises pour un tel service, à l’instar des apôtres Pierre et Jean, à savoir l’assurance, l’humilité et la constance ou la fidélité. En effet, les anciens et les scribes qui les ont fait arrêter et les ont interrogés étaient frappés, étonnés par l’assurance dont Pierre et Jean faisaient montre. D’où leur vient-elle cette assurance ? Elle vient de la conviction que le Ressuscité est avec eux, qu’ils ont été choisis et envoyés, que sa présence et sa force les animent. Chers fils, qu’il en soit ainsi pour vous, mais à condition que vous donniez la priorité à la relation avec Jésus, dans la prière, la méditation, la contemplation ; à condition que vous ne négligiez aucun rendez-vous avec lui ; à condition que vous ne vous laissiez pas happer par l’activisme d’un agenda débordé, du matin au soir, pire encore du soir au matin. C’est la relation avec Jésus qui vous donnera de l’assurance, même devant les hostilités.
Deux dispositions à adopter : chers fils, restez simples et humbles ; sans vous prévaloir de quoi que ce soit, car il n’y a rien qui ne soit un don. Sans l’humilité et la simplicité, il n’y a pas de service véritable, mais bien pouvoir et domination, or le Fils de l’homme à la suite duquel vous voulez marcher est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie. En tenant bon cette ficelle du service, vous éviterez de tomber dans l’autoritarisme, le cléricalisme tant dénoncé par le Pape François, car étant la cause principale des abus de toutes sortes dont souffre notre église aujourd’hui. Attention humilité ne rime pas avec résignation ni avec paresse pastorale. La réponse que j’ai adressée à chacun de vous indique la direction à poursuivre et les efforts à mettre en œuvre. Ne dites jamais, je suis comme ça ! Fuyez le moindre effort surtout dans le service pastoral. Ne soyez pas des retraités dès le lendemain du diaconat. Disponibilité, générosité, promptitude.
Enfin, la réponse des apôtres au Conseil : «Est-il juste devant Dieu de vous écouter, plutôt que d’écouter Dieu ? A vous de juger. Quant à nous, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu ». Cette répartie traduit l’intransigeante fidélité des apôtres à leur mission. Chers fils, ne troquez votre sacerdoce avec aucun avantage, ne diluez pas l’ardeur de votre engagement signifié par le pas décisif que vous avez effectué tout à l’heure ; ne regardez pas en arrière et surtout, pas de compromis et encore moins de compromissions ; préférez la fidélité à Dieu. Soyez rigoureux envers vous-mêmes et intransigeants avec les exigences de votre vie sacerdotale ; cultivez la cohérence et la constance ; ne suivez pas la mentalité du siècle, facilement véhiculé par les réseaux sociaux. Soyez au-dessus de la moyenne sacerdotale, si elle devait exister ; visez l’excellence et ne vous comparez pas à nous pour relativiser la radicalité de votre vocation et édulcorer la qualité de votre vie donnée au Christ pour le service de l’Eglise et des hommes. Ainsi soit-il. Bon courage ».
Débutée à 10h, la messe a pris fin vers 12h 15 dans une solennité marquée par la présence de beaucoup de prêtres, de consacrés et de parents venus accompagner spirituellement ces nouveaux diacres, ces nouveaux serviteurs de l’Eglise et des hommes. A eux, duc in altum !
Albert Faye
Palodial59@gmail.com